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La France n’a pas adopté de loi criminalisant la critique des vaccins à ARNm

Posté le : 7 Mar 2024

À RETENIR:

La France a adopté en février 2024 une loi interdisant l’utilisation de pression, de manipulation et d’informations biaisées dans le but d’inciter à l’abandon de traitements médicaux établis et de mesures de protection sanitaires. Cette loi vise à combattre les dérives sectaires ainsi que les manipulations psychologiques et les pressions susceptibles de mettre en péril la santé des individus.

ÉLÉMENT ANALYSÉ

Erroné

La France a adopté une loi a criminalisant la critique des vaccins à ARNm

Source : Planète 360, Anonyme, 6 Fév 2024

DÉTAIL DU VERDICT

Trompeur:

Ces affirmations stipulent que toute critique contre les vaccins à ARNm conduirait à l’emprisonnement en vertu d’une nouvelle loi française. Cependant, la loi cible uniquement l’utilisation de pressions et de manipulations répétées visant à forcer les gens à interrompre leur traitement ou à se détourner des mesures de protections sanitaires, tout en cachant les risques que cela engendrerait pour leur santé. Ainsi, la loi ne s’applique pas à la majorité des contenus critiquant ou s’opposant aux vaccins à ARNm.

AFFIRMATION COMPLÈTE

La France a adopté une loi a criminalisant la critique des vaccins à ARNm; “Vous allez finir en prison si vous publiez un post contre le vaccin”; “ils préfèrent finalement voter une loi mardi prochain en toute discrétion à l'Assemblée Nationale pour vous interdire de critiquer (un vaccin, une pensée, une idée, une action, un post, etc)”

Vérification

L’adoption du projet de loi sur les dérives sectaires par l’Assemblée Nationale le 14 février 2024 a provoqué l’apparition sur les réseaux sociaux de l’affirmation selon laquelle cette loi criminalisait la critique des vaccins à ARNm. Cependant, ces affirmations sont incorrectes et sont dues à une interprétation erronée du texte final de la loi.

La mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) française définit une dérive sectaire comme suit :

“Il s’agit d’un dévoiement de la liberté de pensée, d’opinion ou de religion qui porte atteinte à l’ordre public, aux lois ou aux règlements, aux droits fondamentaux, à la sécurité ou à l’intégrité des personnes. Elle se caractérise par la mise en œuvre, par un groupe organisé ou par un individu isolé, quelle que soit sa nature ou son activité, de pressions ou de techniques ayant pour but de créer, de maintenir ou d’exploiter chez une personne un état de sujétion psychologique ou physique, la privant d’une partie de son libre arbitre, avec des conséquences dommageables pour cette personne, son entourage ou pour la société.”

Ainsi, une dérive sectaire ne se réfère pas nécessairement à une secte religieuse. Elle désigne plutôt l’acte de porter atteinte à la libre volonté des individus, par exemple à travers l’utilisation de pression psychologique et de manipulation, d’une manière qui est nuisible pour les individus ou pour la société.

Une illustration de ce concept est le cas du YouTuber et naturopathe auto-proclamé Thierry Casasnovas, qui fait l’objet d’une enquête depuis mars 2023 pour exercice illégal de la médecine, escroquerie et emprise mentale. Dans ses vidéos, Casasnovas se prononce contre la vaccination et prétend que la consommation de légumes crus peut guérir le cancer et le diabète. La Miviludes avait d’ailleurs déjà exprimé par le passé des préoccupations concernant l’interruption de traitement chez certains adeptes de Casasnovas.

Une des raisons qui a amené à ce projet de loi est l’augmentation du nombre de signalements pour dérives sectaires auprès de la Miviludes, avec une hausse de 36% de 2020 à 2021. Un tiers de ces signalements concernent des comportements menaçant directement la santé des personnes. C’est le cas par exemple lorsque des personnes ou des groupes incitent des patients atteints de cancer d’interrompre leur traitement médical et de se lancer dans une approche alternative « pseudo-thérapeutique » sans efficacité prouvée, comme le rapport la Fondation pour la Recherche sur le Cancer.

Pour apporter une réponse à ces problèmes, le chapitre III de la loi, intitulé “Protéger la santé”, cible spécifiquement les actions et les discours encourageant les patients à éviter ou à interrompre leurs traitements.

Le projet de loi se réfère en particulier aux « traitements médicaux thérapeutiques ou prophylactiques ». Les mesures prophylactiques, telles que les vaccins, visent à prévenir ou à réduire le risque de maladie. Certaines personnes se sont donc saisies de cette référence aux traitements prophylactiques pour affirmer que le projet de loi interdisait la critique des vaccins à ARNm.

Par exemple, une vidéo sur Instagram affirme que «la France enverra ses citoyens en prison s’ils remettent en question les vaccins à ARNm» ; une autre soutient que « la France a adopté une loi pouvant conduire à l’emprisonnement de toute personne qui se prononce contre les vaccins à ARNm», que «le projet de loi pointe du doigt spécifiquement les vaccins à ARNm », et que « faire des déclarations contre les vaccins, même si elles sont vraies, sera désormais un acte criminel».

En France, certains sites internet se sont fait l’échos de ces affirmations, avec des déclarations comme “Vous allez finir en prison si vous publiez un post contre le vaccin” ou encore “Leur vaccin est tellement irréprochable qu’ils ont besoin d’une loi pour que personne n’en doute.”

Or, c’est une interprétation erronée du contenu de la loi. Tout d’abord, le texte qui a été adopté ne fait aucune mention explicite des vaccins à ARNm, contrairement à ce qui a été affirmé.

Par ailleurs, le texte définit précisément les types de comportements qui seront considérés illégaux en vertu de la nouvelle loi. Le chapitre III article 4 paragraphe 2 stipule ainsi :

“la provocation, au moyen de pressions ou de manœuvres réitérées, de toute personne atteinte d’une pathologie à abandonner ou à s’abstenir de suivre un traitement médical thérapeutique ou prophylactique, lorsque cet abandon ou cette abstention est présenté comme bénéfique pour la santé de la personne visée alors qu’il est, en l’état des connaissances médicales, manifestement susceptible d’entraîner pour elle, compte tenu de la pathologie dont elle est atteinte, des conséquences particulièrement graves pour sa santé physique ou psychique”

Cela signifie que critiquer la sécurité ou l’efficacité des vaccins à ARNm ne sera pas illégal en soi. En revanche, exercer une pression psychologique ou physique, ou faire usage de techniques de manipulation, à plusieurs reprises, en vue d’inciter quelqu’un à ne pas se faire vacciner, pourra tomber sur le coup de la loi.

Cela signifie également que, si la critique est fondée sur des données médicales prouvées, elle ne tombera pas dans le champ d’application de cette loi. Par exemple, commenter les rares risques de myocardite des vaccins à ARNm n’est pas illégal, tant que les faits médicaux sont présentés de manière exacte. Par exemple, cela implique, dans les cas des myocardites, de rappeler que les risques de complications cardiovasculaires sont plus élevés suite au COVID-19.

Le paragraphe 5 du même article stipule :

“Lorsque la provocation s’accompagne d’une information claire et complète quant aux conséquences pour la santé et que les conditions dans lesquelles cette provocation a été faite ne remettent pas en cause la volonté libre et éclairée de la personne, les délits définis au présent article peuvent ne pas être constitués.”

En d’autres termes, publier des opinions négatives sur les vaccins à ARNm, tant que cela est fait de manière objective en informant également les gens sur les risques de ne pas se faire vacciner et sans compromettre leur liberté de décision, ne sera pas illégal.

Enfin, le paragraphe sept du même article offre une protection aux lanceurs d’alerte. La loi française 2016-1691 définit un lanceur d’alerte comme une personne de bonne foi et sans conflit d’intérêt qui révèle une menace sérieuse contre l’intérêt public. Contrairement à ce que certains ont affirmé, cette loi ne cible donc pas les personnes révélant un scandale sanitaire, une négligence ou un acte répréhensible de la part d’un fabricant de vaccins ou d’une agence de santé publique et qui constituerait une menace sérieuse pour le public.

En résumé, la France a adopté un projet de loi en février 2024 qui a renforcé sa capacité à lutter contre les dérives sectaires mettant en danger la santé des personnes en les incitant à s’abstenir de traitement et de mesures prophylactiques. Cependant, cette loi n’a pas criminalisé la critique des vaccins à ARNm, ni ne punit de prison une expression contraire à l’utilisation des vaccins à ARNm.

En fait, la loi cible uniquement les actes et les discours ayant recours à la pression et la manipulation psychologique pour contraindre les gens à se détourner d’un traitement médical. Ceux qui critiquent les vaccins à ARNm tout en étant transparents sur les risques de la non-vaccination et en respectant la liberté des personnes de prendre leurs propres décisions ne tombent pas sur le coup de cette nouvelle loi.

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