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Le niveau d’aluminium dans les vaccins infantiles est sûr, même pour les nourrissons
À RETENIR:
Certains vaccins infantiles contiennent des sels d’aluminium pour renforcer l’efficacité de la vaccination. L’aluminium est rapidement éliminé de l’organisme grâce aux reins. La quantité d’aluminium présente dans les vaccins infantiles est inférieure à celle consommée via l’alimentation et se situe en dessous des limites de sécurité établies pour l’aluminium.
ÉLÉMENT ANALYSÉ
Verdict :
Affirmation :
DÉTAIL DU VERDICT
Erroné :
Cette affirmation semble se fonder sur la limite de sécurité pour l’aluminium chez les personnes recevant une nutrition par voie intraveineuse, utilisée principalement par celles dont les reins ne peuvent pas éliminer l’aluminium, y compris les nourrissons prématurés. Cette limite n’est donc pas pertinente pour la population générale.
Inexact :
Contrairement à ce que l’affirmation suggère, la quantité d’aluminium dans les vaccins infantiles est inférieure à la limite de sécurité pour les produits biologiques injectables spécifiée dans le Code of Federal Regulations américain. Une analyse de la pharmacocinétique de l’aluminium a montré que la quantité d’aluminium provenant des vaccins qui entre dans le sang des nourrissons n’est pas dangereuse.
AFFIRMATION COMPLÈTE
Vérification
Les opposants à la vaccination citent souvent la présence d’aluminium dans certains vaccins comme preuve de leur toxicité. Science Feedback a déjà expliqué dans des analyses précédentes que ces affirmations ne sont pas fondées.
Néanmoins, ces affirmations persistent. Par exemple, une publication Instagram de février 2024 a prétendu que les nouveau-nés recevant des vaccins seraient exposés à des quantités d’aluminium dépassant la limite de sécurité fixée par la Food and Drug Administration américaine (FDA). Cette affirmation était déjà véhiculée par une publication Facebook francophone de 2020.
Selon la publication Instagram américaine, la plupart des vaccins contiendraient entre « 225 microgrammes et 850 microgrammes » d’aluminium, tandis que « selon les directives de la FDA, la quantité maximale d’aluminium qu’une personne peut gérer en toute sécurité est de 4 microgrammes par kilo ». Cela signifierait qu’un enfant devrait peser au moins 56 kilogrammes pour pouvoir recevoir en toute sécurité une injection contenant 225 microgrammes d’aluminium (225 microgrammes divisés par quatre), et un poids irréaliste de 212 kilogrammes pour une dose contenant 850 microgrammes d’aluminium. La publication francophone, elle, se contente d’affirmer que “chez un nourrisson de 2 mois, la dose d’aluminium métal injectée par la première dose de vaccin est nettement supérieure à la Dose Minimale Toxique fixée par la FDA (Food and Drug Administration) et de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé).”
Cependant, le raisonnement derrière cette affirmation est erroné, car sa référence pour la limite de sécurité de l’aluminium chez les enfants est incorrecte. De plus, l’affirmation selon laquelle les vaccins infantiles contiennent des niveaux dangereux d’aluminium est contredite par des études publiées, comme nous l’expliquons ci-dessous.
Pour les nourrissons, le régime alimentaire est la plus grande source d’aluminium, pas les vaccins
L’aluminium est le métal le plus abondant sur Terre. Nous y sommes constamment exposés via l’eau et les aliments, en particulier en tant que contaminant issu des processus industriels de fabrication et d’emballage des aliments[1]. Un rapport publié en 2008 par l’Agency for Toxic Substances and Disease Registry (ATSDR), une branche du Département américain de la santé et des services sociaux, estime que les adultes aux États-Unis consomment entre sept et neuf milligrammes d’aluminium par jour.
Les sels d’aluminium sont également utilisés comme adjuvants dans certains vaccins. Les adjuvants sont des molécules qui renforcent la réaction du système immunitaire à un vaccin. Ils permettent de s’assurer qu’un vaccin stimulera le système immunitaire de manière à générer une mémoire immunitaire durable contre le pathogène.
Selon l’ATSDR, la concentration d’aluminium varie entre 0,0092 et 0,049 milligrammes par litre (mg/L) dans le lait maternel, entre 0,46 et 0,93 mg/L dans les préparations à base de soja, et entre 0,058 et 0,15 mg/L dans les préparations à base de lait.
En outre, le Children’s Hospital of Philadelphia a calculé que les enfants absorbent entre 7 et 117 milligrammes d’aluminium via leur alimentation au cours de leurs six premiers mois de vie, alors qu’ils reçoivent seulement 4,4 milligrammes par le biais des vaccins infantiles.
Ainsi, les nourrissons sont exposés à la majorité de l’aluminium via leur alimentation, et non via les vaccins.
La limite de sécurité pour l’aluminium dans les vaccins est plus élevée que celle utilisée dans l’affirmation
L’affirmation contenue dans la publication Instagram de 2024 ne précise pas sa source pour la limite citée concernant l’aluminium (quatre microgrammes par kilogramme de poids corporel). Cependant, nous avons trouvé un document de la FDA fournissant des directives sur l’étiquetage du contenu en aluminium pour les produits liés à la nutrition parentérale (PN) – alimentation administrée par voie intraveineuse – qui pourrait être à l’origine de cette affirmation. Ce document indique :
« La FDA recommande que l’exposition totale à l’aluminium (TAE) via la PN ne dépasse pas 5 mcg/kg/jour au total afin de protéger la sécurité de tous les patients. »
Cependant, cette limite ne s’applique pas à la vaccination. Les personnes nécessitant une nutrition parentérale ne sont pas représentatives de la population générale. Selon le même document de la FDA, cette forme d’alimentation est principalement utilisée pour les personnes dont les reins ne fonctionnent pas correctement, ainsi que pour les bébés prématurés dont les reins ne sont pas encore fonctionnels.
Les reins jouent également un rôle crucial dans l’élimination de l’aluminium circulant dans le sang. En effet, 99 % de l’aluminium ingéré qui passe dans le sang est excrété par les reins. Seuls 0,5 % de l’aluminium restent dans la circulation sanguine après 24 heures[1].
La FDA explique :
« Les recherches indiquent que les patients souffrant d’insuffisance rénale, y compris les nouveau-nés prématurés, qui reçoivent des niveaux parentéraux d’aluminium supérieurs à 4 à 5 microgrammes/kilogramme/jour (mcg/kg/jour) accumulent de l’aluminium à des niveaux associés à des toxicités pour le système nerveux central et les os. »
Et :
« Parce que les patients souffrant d’insuffisance rénale, y compris tous les nouveau-nés prématurés, représentent une grande partie de ceux nécessitant un soutien de nutrition parentérale, la FDA recommande que l’exposition totale à l’aluminium (TAE) via la PN ne dépasse uniformément pas 5 mcg/kg/jour pour protéger la sécurité de tous les patients », déclare la FDA.
Ainsi, les personnes nécessitant une nutrition parentérale à long terme sont souvent celles dont le corps n’est pas capable d’éliminer correctement l’aluminium — d’où la limite de cinq microgrammes par kilogramme de poids corporel par jour établie par la FDA.
En revanche, les enfants en bonne santé recevant des vaccins infantiles ont des reins fonctionnels, capables d’éliminer rapidement l’aluminium. Par conséquent, cette limite sur le contenu en aluminium n’est pas pertinente pour la vaccination infantile.
En fait, le Code of Federal Regulations (CFR) indique une autre limite pour la quantité d’aluminium dans les produits biologiques injectables, y compris les vaccins. Il stipule que la quantité d’aluminium ne doit pas dépasser entre 0,85 et 1,25 milligrammes par dose, selon la méthode utilisée pour mesurer la quantité d’aluminium, un seuil également retenue dans la Pharmacopée Européenne[2].
Comme le montre cette liste des ingrédients des vaccins fournie par le Children’s Hospital of Philadelphia, les quantités d’aluminium dans les vaccins infantiles recommandés ne dépassent pas cette limite.
La quantité d’aluminium provenant des vaccins ne dépasse pas le niveau de risque minimal, selon une étude
Bien que l’on sache que la quantité d’aluminium dans les vaccins respecte la limite de sécurité établie par le Code of Federal Regulations (CFR), comme expliqué ci-dessus, il est important de prendre en compte une nuance. En effet, la limite fixée par le CFR s’applique par dose et ne se traduit pas facilement en une quantité d’aluminium par poids corporel de l’enfant.
Cette nuance est cruciale, car une dose de vaccin administrée à un bébé et la même dose donnée à un adulte entraîneraient des concentrations d’aluminium différentes dans le corps en raison des différences de taille. Il est donc nécessaire d’évaluer si l’administration de ces vaccins à de jeunes nourrissons est réellement sûre.
Les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des États-Unis se sont référés à une recherche menée par Mitkus et ses collègues pour répondre à cette question en calculant la charge d’aluminium dans le corps des nourrissons[3]. Pour ce faire, plusieurs facteurs ont été pris en compte :
Les auteurs ont utilisé le niveau de risque minimal (Minimal Risk Level, MRL) pour l’aluminium, établi à un milligramme par kilogramme de poids corporel par jour lorsqu’il est ingéré, selon l’Agency for Toxic Substances and Disease Registry. Contrairement à la limite du CFR, le MRL est déterminé en fonction du poids corporel, ce qui permet de l’adapter au poids des nourrissons, qui est faible mais augmente continuellement. Ce MRL est également plus pertinent pour les vaccins que la limite de la FDA sur l’aluminium dans la nutrition parentérale, car il peut être appliqué à l’ensemble de la population, et non uniquement à ceux souffrant d’insuffisance rénale.
Mitkus et al. ont converti la limite de sécurité pour l’aluminium ingéré en une limite de sécurité pour l’aluminium circulant dans le sang. Pour ce faire, ils ont pris en compte le fait qu’une petite fraction seulement de l’aluminium ingéré traverse le tractus gastro-intestinal pour atteindre la circulation sanguine.
Enfin, les auteurs ont pris en considération le fait que l’aluminium est continuellement éliminé du sang par les reins et que la vaccination est généralement réalisée par injection intramusculaire, et non intraveineuse.
Ce détail est d’importance. Lors d’une injection intraveineuse, tout l’aluminium entre directement dans le sang, entraînant une augmentation rapide des niveaux d’aluminium dans la circulation. En revanche, lors d’une injection intramusculaire, la majeure partie de l’aluminium reste initialement dans le muscle et entre progressivement dans le sang. Cela signifie que l’exposition systémique à l’aluminium est plus faible par rapport à une injection intraveineuse[3].
En tenant compte de toutes ces variables, Mitkus et ses collègues ont conclu que la quantité d’aluminium administrée via l’alimentation des nourrissons et les vaccins infantiles ne dépasse pas le niveau de risque minimal (Figure 1). En d’autres termes, les résultats disponibles indiquent que la quantité d’aluminium présente dans le sang après une vaccination est sûre pour les nourrissons.
En résumé, la quantité d’aluminium contenue dans certains vaccins infantiles ne dépasse pas les limites fédérales américaines et le seuil européen. Bien que certains s’inquiètent de voir cette quantité supérieure aux recommandations de la FDA pour les produits de nutrition parentérale, cela omet le fait que la nutrition parentérale chez les nourrissons concerne principalement les bébés prématurés, dont les reins ne sont pas encore fonctionnels pour éliminer l’aluminium.
Cela ne s’applique pas à la majorité des nourrissons, dont les organismes sont capables d’éliminer efficacement l’aluminium. Les preuves disponibles indiquent que la quantité d’aluminium provenant des vaccins dans le sang des nourrissons ne dépasse pas le niveau de risque minimal.
Références:
- Corkins et al. (2019) Aluminum Effects in Infants and Children. Pediatrics.
- Facciolà et al. (2022) An Overview of Vaccine Adjuvants: Current Evidence and Future Perspectives. Vaccines.
- Mitkus et al. (2011) Updated aluminum pharmacokinetics following infant exposures through diet and vaccination. Vaccine.