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Les preuves scientifiques montrent que les vaccins à ARNm COVID-19 sont efficaces; leurs avantages l’emportent sur leurs risques, contrairement à ce qu’affirme Retsef Levi

Posté le : 10 Fév 2023

À RETENIR

Si les vaccins COVID-19 sont associés à un risque de myocardite, ce risque est encore plus élevé chez les personnes atteintes par le COVID-19. De plus, le COVID-19 peut être à l’origine de multiples complications, dont les pathologies cardiaques ne sont qu’un exemple. En réduisant le risque d’infection et de maladie grave, les vaccins contre le COVID-19 offrent de nombreux avantages qui dépassent la seule prévention des problèmes cardiaques associés au COVID. En tant que tels, les avantages des vaccins l’emportent sur leurs risques.

élément analysé

Infondé

Les vaccins à ARNm COVID-19 ne fonctionnent pas et causent des atteintes graves, y compris des décès.

Source : Twitter/X, Retsef Levi, 31 Jan 2023

DÉTAIL DU Verdict

Preuves insuffisantes:

Dans l’étude coécrite par Levi, les auteurs ne disposaient pas d’informations sur le statut vaccinal des personnes qui avaient développé des problèmes cardiaques. Il est impossible d’associer ces problèmes cardiaques à la vaccination de manière fiable sans connaître le statut vaccinal de ces personnes au préalable.

Picorage (Cherry picking):

Le tweet de Levi ignore de nombreuses autres études montrant que la vaccination contre le COVID-19 n’est pas associée à un taux de mortalité plus élevé, à des infarctus du myocarde ou à des troubles du rythme. En revanche, Levi cite sans critique des études qui semblent soutenir son affirmation en dépit de leurs problèmes méthodologiques.

AFFIRMATION COMPLÈTE

"Les preuves que les vaccins à ARNm causent de graves dommages, y compris la mort, en particulier chez les jeunes, s’accumulent et sont indiscutables. Nous devons arrêter de les utiliser immédiatement" ; "Ils doivent être stoppés parce qu'ils n'ont absolument pas tenu leurs promesses d'efficacité. Et, plus important encore, ils doivent être stoppés en raison des preuves grandissantes et indiscutables qu'ils causent des dommages sans précédent, y compris la mort de jeunes adultes et d'enfants."

Vérification

Au début du mois de février 2023, des affirmations selon lesquelles un professeur du MIT et « expert de premier plan » a trouvé des preuves de dommages graves causés par les vaccins à ARNm contre le COVID-19 et a demandé l’arrêt de leur utilisation sont devenues virales sur les réseaux sociaux. Ces allégations sont fondées sur un tweet de Retsef Levi, professeur au groupe de gestion opérationnelle de la Sloan School of Management (école de management Sloan) du MIT.

Dans ce tweet, il a affirmé que « les preuves que les vaccins à ARNm causent de graves dommages, y compris la mort, en particulier chez les jeunes, s’accumulent et sont indiscutables. » Pour étayer cette affirmation, il a cité plusieurs études, dont une de Fraiman et al., une de Schwab et al., et une autre co-écrite par Levi lui-même[1-3].

Levi n’a toutefois pas mentionné qu’une lecture attentive montre que ces études ne fournissent pas les preuves nécessaires à son affirmation. Les études de Fraiman et al. et de Schwab et al. ont été discutées dans des vérifications précédentes de Health Feedback (voir ici et ici). Nous avons documenté les multiples limites de leur méthodes nous empêchant de tirer des conclusions fiables quant à l’innocuité des vaccins. Cependant, en citant ces études sans réserve, Lévi induit les utilisateurs en erreur et leur laisse croire le contraire.

Health Feedback a contacté le MIT pour obtenir des commentaires sur la déclaration de Levi. Dans un courriel, le bureau de presse du MIT a déclaré que « les opinions représentées par le professeur Retsef Levi sont les siennes », et que les membres de la faculté « sont libres d’exprimer leurs opinions sur les sujets qui les intéressent », ajoutant :

« Les cadres dirigeants du MIT, la direction du MIT Sloan et les professionnels de santé publique du MIT Medical ont constamment souligné les avantages associés à la vaccination et à la tenue d’un schéma vaccinal à jour pour tous les vaccins Covid-19 recommandés ».

Le tweet de Levi a été retweeté plus de 5700 fois, et plusieurs médias ont également diffusé ses propos, notamment France Soir et The Epoch Time France. Ces articles ne mentionnent pas non plus les limites des études citées par Levi.

Les études de Fraiman et al. et de Schwab et al. ayant déjà fait l’objet d’une analyse approfondie dans des revues précédentes (voir ci-dessus), cette vérification se concentrera sur l’analyse de l’étude de Sun et al. dont Levi est coauteur.

L’étude a utilisé des données de population générale sans aucune information sur le statut vaccinal des personnes ayant développé des problèmes cardiaques.

L’étude, publiée dans la revue Scientific Reports en avril 2022, a utilisé un ensemble de données concernant les appels aux services médicaux d’urgence nationaux israéliens de janvier 2019 à juin 2021 [1]. Les auteurs ont examiné l’association entre le nombre d’appels pour arrêt cardiaque (AC) et syndrome coronarien aigu (SCA) chez les personnes âgées de 16 à 39 ans durant cette période. Cette période particulière a été choisie afin de comparer les appels pendant les périodes pré-pandémique, pandémique pré-vaccinale et pandémique post-vaccinale.

Les auteurs ont indiqué avoir observé une corrélation entre le nombre d’appels AC et SCA et le nombre de doses de vaccin administrées mais aucune corrélation avec les cas de COVID-19. Sur la base de cette observation, les auteurs ont suggéré que la vaccination contre le COVID-19 avait causé ces problèmes cardiaques et ont appelé Israël et d’autres pays à mener une « enquête approfondie sur l’association apparente entre l’administration du vaccin contre le COVID-19 et les effets cardiovasculaires néfastes chez les jeunes adultes « .

Plusieurs scientifiques ont signalé des problèmes liés à cette conclusion. L’un des plus notables est que les auteurs ne disposaient pas d’informations sur le statut vaccinal des personnes qui avaient développé des problèmes cardiaques. Pour évaluer un éventuel lien de causalité entre la vaccination contre le COVID-19 et les problèmes cardiaques, il faut d’abord constater une augmentation des problèmes cardiaques spécifiquement chez les personnes vaccinées et absente chez les personnes non vaccinées. Sans connaître le statut vaccinal de ces patients, ce n’est pas possible.

L’utilisation de données au niveau d’une population pour en tirer des conclusions concernant des individus—dans ce cas, des groupes ayant un statut vaccinal différent— est un raisonnement fallacieux connu sous le nom de sophisme écologique ou erreur écologique—ecological fallacy, en anglais. Par exemple, si les habitants d’un pays A sont, en moyenne, plus grands que ceux d’un pays B, cela ne signifie pas que chaque individu du pays A sera systématiquement plus grand que n’importe quel individu du pays B. Dans ce cas, l’inférence de données à l’échelle des individus à partir de ce qui est connu à l’échelle de la population est erronée.

Le sophisme écologique est caractéristique de la désinformation sur les vaccins COVID-19 fondée sur des corrélations simplistes en population générale. Health Feedback en a documenté quelques exemples ici et ici.

Les auteurs eux-mêmes étaient conscients de cette limite. Ils écrivent ainsi : « Il est important de noter la principale limite de cette étude, à savoir qu’elle repose sur des données agrégées qui n’incluent pas d’informations spécifiques concernant les patients affectés, notamment les résultats hospitaliers, les comorbidités sous-jacentes, le statut vaccinal et le statut infectiologique pour le COVID-19. De telles données connexes sont essentielles pour déterminer la nature exacte de l’augmentation apparente d’appels pour AC et SCA chez les jeunes, ainsi que les facteurs de causalité sous-jacents ».

Le médecin-chercheur Kyle Sheldrick résume ainsi la situation : « Sun et les autres auteurs présentent une étude mal conçue, invitant tacitement les lecteurs à conclure, à tort, que les vaccins contre le COVID ont provoqué une forte augmentation des arrêts cardiaques chez les jeunes (alors qu’ils n’ont en fait recueilli aucune information sur le statut vaccinal de ces personnes) ».

Le tweet de Levi ne fait cependant aucune mention de ce biais majeur de l’étude. Il ne mentionne pas non plus la note de l’éditeur annexée à l’étude le 5 mai 2022, signalant que « les lecteurs sont avertis que les conclusions de cet article sont sujettes à des critiques qui sont en cours d’examen par les éditeurs. Une autre réponse éditoriale suivra une fois que tous les acteurs concernés auront eu l’occasion de répondre de manière complète ».

Health Feedback a contacté Scientific Reports pour savoir si une décision éditoriale avait été prise depuis. Dans un courriel, Rafal Marszalek, rédacteur en chef du journal, a déclaré que « cet article fait toujours l’objet d’une enquête, nous considérons attentivement toutes les informations et notre réponse conformément aux directives COPE et aux politiques de Springer Nature », mais qu’ils n’étaient pas en mesure de partager plus de détails pour le moment.*

Ce n’est pas la première fois que cette étude est utilisée pour diffuser des informations erronées sur l’innocuité des vaccins contre le COVID-19. En fait, cette désinformation remonte à mai 2022, et Levi lui-même a déclaré à Reuters que la corrélation ne prouvait pas la causalité.

L’épidémiologiste Gideon Meyerowitz-Katz a également discuté de l’étude dans un fil de discussion Twitter posté en mai 2022 et souligné certaines discordances dans l’analyse, comme les graphiques présentés. Il a souligné que l’un des graphiques avait fixé l’axe y (l’axe vertical) pour les appels AC à quatre au lieu de zéro si bien que la corrélation avec les doses de vaccins distribuées semble plus forte qu’elle ne l’est en réalité (voir la figure 1), qualifiant cette pratique de trompeuse.

Figure 1. Comparaison du graphique original de l’étude de Sun et al. (en haut) et d’un graphique montrant les mêmes données mais avec l’axe des y de gauche fixé à zéro plutôt qu’à quatre (en bas). Modifié à partir de la figure 1 de Sun et al. et de ce graphique par Gideon Meyerowitz-Katz.


“Un autre problème concernant la fiabilité de la corrélation peut également être déduit en visualisant les données relatives aux doses de vaccin et aux cas de COVID-19 dans le groupe d’âge étudié (16 à 39 ans), montrant que ces deux éléments sont fortement colinéaires,” a déclaré Meyerowitz-Katz (voir figure 2).

Figure 2. Corrélation entre les premières doses de vaccin et les cas de COVID-19 pendant la même période. Source : Gideon Meyerowitz-Katz.

Étant donné que les deux lignes se ressemblent fortement, le fait que les auteurs n’aient détecté une corrélation que pour les doses de vaccin mais pas pour les cas de COVID-19—même si les doses de vaccin et les cas de COVID-19 faisaient partie du même modèle—soulève des questions quant à la significativité de la corrélation détectée.

Nous disposons d’études de meilleure qualité sur l’association entre les problèmes cardiaques et la vaccination par le COVID-19.

Ce fil de discussion Twitter de Voices for Vaccines, une organisation qui fournit des informations crédibles sur les vaccins, a souligné que l’étude de Sun et al. a en fait été précédée il y a plusieurs mois par cette étude en Israël qui a examiné l’innocuité des vaccins COVID-19 en utilisant les dossiers de santé et non les appels médicaux d’urgence [4]. Les auteurs ont détecté un risque élevé de myocardite chez les personnes ayant reçu le vaccin COVID-19 de Pfizer-BioNTech (un à cinq événements pour 100 000 personnes) mais ont également constaté un risque beaucoup plus élevé chez les personnes ayant reçu le COVID-19 (voir figure 3).

Figure 3. Risque excédentaire absolu de divers événements indésirables après une vaccination ou une infection par le SRAS-CoV-2 [4]. Adapté de la figure originale de Barda et al. Il convient de noter que les effets de la vaccination et de l’infection par le SRAS-CoV-2 ont été estimés avec des cohortes différentes : les personnes vaccinées ont été comparées à des personnes non vaccinées, tandis que celles qui ont été testées positives pour le SRAS-CoV-2 ont été comparées à des personnes non infectées. Ainsi, les risques liés à la vaccination et ceux liés à l’infection ne peuvent être directement comparés.

Une étude menée aux États-Unis sur 6,2 millions de personnes ayant reçu les vaccins à ARNm COVID-19 n’a pas non plus trouvé de corrélation entre la vaccination et l’infarctus du myocarde ou l’arythmie (rythme cardiaque anormal) [5].

Le fil de discussion souligne également que ces études ont utilisé des dossiers médicaux, par opposition aux appels d’urgence, qui sont plus fiables pour diagnostiquer l’état de santé d’une personne.
Une autre étude, qui a analysé les dossiers médicaux de plus de 10 millions de vétérans américains, a rapporté que les personnes ayant eu le COVID-19 étaient plus susceptibles de développer des problèmes cardiovasculaires et que ce risque subsistait même 12 mois après l’infection [6].

Figure 4. Risks and 12-month burdens of incident post-acute COVID-19 cardiovascular outcomes compared with people who had no evidence of SARS-CoV-2 infection[6]. Outcomes were ascertained 30 days after the COVID-19-positive test until the end of follow-up. Hazard ratios are presented on the left. On the right, the length of the bars represents the excess burden per 1,000 persons at 12 months.

Furthermore, studies so far haven’t found that vaccinated people are more likely to die compared to unvaccinated people[7-9].

Unlike the study by Sun et al., these studies have information about vaccination status, and therefore can more reliably draw associations with vaccination.

Levi’s tweet however, made no mention of these studies.

Health Feedback reached out to MIT for comment, and will update this review if new information becomes available.

Conclusion

In short, Levi’s claim that COVID-19 vaccines are responsible for deaths in young people is unsubstantiated. Although he did cite some studies as evidence, reading those studies in detail would show that none actually provide reliable evidence for his claim. His claim ignores other studies of higher quality showing that COVID-19 vaccination doesn’t increase the risk of death or heart attacks.

While COVID-19 vaccines are associated with a higher risk of myocarditis, this risk is higher in people who get COVID-19. Moreover, COVID-19 is associated with a host of health problems, of which heart problems are just one. By reducing the risk of infection and severe disease in people, COVID-19 vaccines offer many benefits that go beyond just preventing COVID-associated heart problems. As such, the vaccines’ benefit outweighs their risk.

UPDATE (13 February 2023):

This publication was updated to include a comment by MIT News Office, which can be found in the fourth paragraph.

UPDATE (10 February 2023):

This publication was updated to include a comment by Scientific Reports regarding the ongoing editorial review of the study by Sun et al., which can be found in the thirteenth paragraph.

Références

  1. Fraiman et al. (2022) Serious adverse events of special interest following mRNA COVID-19 vaccination in randomized trials in adults. Vaccine.
  2. Schwab et al. (2022) Autopsy-based histopathological characterization of myocarditis after anti-SARS-CoV-2-vaccination. Clinical Research in Cardiology.
  3. Sun et al. (2021) Increased emergency cardiovascular events among under-40 population in Israel during vaccine rollout and third COVID-19 wave. Scientific Reports.
  4. Barda et al. (2021) Safety of the BNT162b2 mRNA Covid-19 Vaccine in a Nationwide Setting. New England Journal of Medicine.
  5. Klein et al. (2021) Surveillance for Adverse Events After COVID-19 mRNA Vaccination. JAMA Network.
  6. Xie et al. (2022) Long-term cardiovascular outcomes of COVID-19. Nature Medicine.
  7. Xu et al. (2021) COVID-19 Vaccination and Non–COVID-19 Mortality Risk — Seven Integrated Health Care Organizations, United States, December 14, 2020–July 31, 2021. Morbidity and Mortality Weekly Report.
  8. Bilinski et al. (2023) COVID-19 and Excess All-Cause Mortality in the US and 20 Comparison Countries, June 2021-March 2022. JAMA Network.
  9. Tu et al. (2023) SARS-CoV-2 Infection, Hospitalization, and Death in Vaccinated and Infected Individuals by Age Groups in Indiana, 2021‒2022. American Journal of Public Health.

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