- Climat
Le réchauffement climatique ne signifie pas que toutes les régions se réchauffent au même rythme, voici pourquoi

Le réchauffement climatique se produit depuis des décennies[1]. Ce n’est pas un sujet de débat, mais une conclusion largement soutenue par des preuves scientifiques. Cela dit, il existe encore des malentendus sur ce que signifie réellement le réchauffement climatique.
L’un de ces malentendus est que le réchauffement climatique signifie que toutes les régions se réchauffent au même rythme. Bien que les températures moyennes mondiales augmentent depuis des décennies[1], toutes les régions du globe ne connaissent pas la même hausse de température sur une période donnée.
Cependant, cette idée reçue est entretenue par des désinformateurs qui prétendent que les données de température d’une seule région peuvent invalider les conclusions bien établies – comme le lien entre le CO₂ atmosphérique et l’élévation des températures mondiales[1] – mises en évidence par les climatologues grâce aux données recueillies à travers le monde.
Afin de dissiper ces idées fausses, nous allons examiner ce que signifie réellement le « réchauffement climatique » aux échelles régionales et mondiales.
À RETENIR :
- Ce que signifie le réchauffement climatique : le réchauffement climatique se produit lorsque la température moyenne mondiale augmente sur de longues périodes, des décennies ou plus.
- Ce que le réchauffement climatique ne signifie pas : le réchauffement climatique n’est pas un réchauffement « uniforme » dans toutes les régions. Sur une période donnée de réchauffement global, certaines zones seront plus froides ou plus chaudes que la moyenne mondiale.
- Le rôle du dioxyde de carbone (CO₂) dans le réchauffement climatique : les preuves scientifiques montrent clairement que l’augmentation des niveaux de CO₂ dans l’atmosphère terrestre est le principal moteur du réchauffement climatique récent. Le CO2 entraîne un excès de chaleur par l’effet de serre.
LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE NE SIGNIFIE PAS QUE TOUTES LES RÉGIONS SE RÉCHAUFFENT AU MÊME RYTHME
Lorsque des termes scientifiques sont adoptés par le grand public, des malentendus peuvent survenir et entraîner une confusion sur ce qui se passe réellement sur notre planète. Cette confusion est aggravée par la désinformation climatique, qui exploite ces incompréhensions pour promouvoir le climatoscepticisme.
Par le passé, nous avons clarifié certaines idées fausses sur le terme « changement climatique » en mettant en évidence les différences entre climat et météo : le changement climatique se produit sur des décennies, tandis que la météo varie sur des jours ou des semaines. Plus récemment, nous avons expliqué pourquoi les vagues de froid peuvent encore survenir malgré le réchauffement climatique. Mais une autre question intéressante est : comment le réchauffement climatique affecte-t-il différentes régions de la Terre ?
À première vue, l’expression « réchauffement climatique » peut laisser penser que toutes les régions du globe se réchauffent au même rythme. Mais ce n’est pas le cas. Bien que la plupart des endroits sur Terre connaissent actuellement un réchauffement[1], certaines régions se réchauffent plus rapidement que d’autres.
Pour en savoir plus, Science Feedback a contacté un expert en variabilité du climat, Adam Scaife. Scaife, professeur à l’Université d’Exeter et responsable des prévisions mensuelles à décennales au Met Office au Royaume-Uni, a expliqué dans un e-mail à Science Feedback :

Adam Scaife
Professeur, Université d’Exeter
Bien qu’elles soient liées, nous ne nous attendons pas à une correspondance parfaite entre les températures régionales et les températures mondiales. Les conditions météorologiques locales, l’état de la surface des océans et la variation des taux de réchauffement selon les régions influencent les températures locales.
Scaife souligne que ce n’est pas parce que la température moyenne mondiale augmente que chaque région se réchauffera de la même manière. Certaines régions se réchaufferont plus lentement, voire se refroidiront sur la même période. C’est ainsi que fonctionnent les moyennes : si la plupart des températures augmentent, cela fera grimper la moyenne globale, même si certaines zones restent relativement stables ou, dans de rares cas, deviennent plus froides.
Cependant, ces variations ne sont pas totalement aléatoires. Par exemple, la plupart des régions terrestres se réchauffent plus rapidement que la moyenne mondiale, tandis que les océans se réchauffent plus lentement[2]. Toutefois, les taux de réchauffement peuvent également varier au sein même des régions terrestres et océaniques.
Comme le montre la figure 1, les changements de température sur Terre au cours du siècle dernier (1900-2012) ont été différents d’une région à l’autre. Certaines zones (comme le sud du Groenland) montrent peu de changement au cours de cette période, malgré une augmentation globale de la température moyenne mondiale. En France métropolitaine, la température s’est déjà réchauffée de 1,7°C depuis 1900.
Cette variabilité montre pourquoi il peut être problématique de choisir arbitrairement un endroit sur Terre pour évaluer le réchauffement global de la planète. Sélectionner une région qui est restée plus fraîche que la moyenne conduirait à sous-estimer le réchauffement climatique mondial, et inversement, choisir une région qui s’est réchauffée plus rapidement donnerait une surestimation.
L’Arctique est un excellent exemple, car des études ont montré qu’il se réchauffe quatre fois plus vite que la moyenne mondiale depuis 1979[6]. Comme l’a expliqué le Met Office du Royaume-Uni dans un e-mail à Science Feedback :
« Certaines régions, comme l’Arctique, se réchauffent plus rapidement que d’autres. Aux pôles, les glaciers et les calottes glaciaires réfléchissent l’énergie solaire vers l’espace. Ainsi, lorsqu’il y a moins de glace, moins d’énergie du soleil est réfléchie. La région se réchauffe alors encore plus vite, ce qui entraîne une fonte supplémentaire de la glace. Ce phénomène est connu sous le nom de boucle de rétroaction positive. »
La variabilité du réchauffement entre différentes régions explique pourquoi les climatologues évaluent le réchauffement climatique en analysant les variations moyennes de température à l’échelle mondiale, et non pas uniquement celles d’une seule région. Cette approche permet aux scientifiques de dépasser les fluctuations locales pour identifier une tendance globale. Grâce à cette méthode, ils ont établi sans équivoque que la Terre est en train de se réchauffer[1].
Le réchauffement climatique récent a été principalement causé par les émissions de gaz à effet de serre issues des activités humaines[1]. Ces gaz piègent l’énergie excédentaire dans le système climatique terrestre par le biais de l’effet de serre, ce qui entraîne une augmentation des températures mondiales[4] (voir illustration ci-dessous).
Figure : représentation de l’énergie entrante et sortante, influencée par l’effet de serre. La vapeur d’eau (H₂O) joue un rôle essentiel dans le maintien de l’effet de serre naturel, tandis que l’augmentation du CO₂ est le principal moteur de l’effet de serre renforcé par les activités humaines. Lorsque le rayonnement solaire incident (à courte longueur d’onde, représenté par des flèches jaunes) est absorbé par la surface terrestre, il est réémis sous forme de rayonnement infrarouge (à grande longueur d’onde, représenté par les flèches rouges). Ce rayonnement peut ensuite être absorbé et réémis par le CO₂ présent dans l’atmosphère terrestre, emprisonnant ainsi la chaleur dans le système climatique terrestre. Source : Météo-France
Malgré des preuves solides du réchauffement climatique, les désinformateurs continuent de picorer des données issues d’un seul lieu ou région – souvent en les interprétant de manière erronée – pour affirmer que les conclusions des climatologues sur le réchauffement climatique sont fausses.
Un exemple récent provient d’un groupe appelé Association des climato-réalistes, qui diffuse depuis longtemps de la désinformation climatique, comme nous l’avons déjà montré. En novembre 2024, ils relaient une vidéo sur X compilant des titres de presse relatifs à des niveaux de réchauffement plus élevés dans de nombreuses régions (France, Australie, Pays-Bas, Israël, Afrique, Canada, Finlande, Russie, Nouvelle-Angleterre), ironisant sur la « course au réchauffement climatique ». En mars 2025, la CO2 Coalition – qui diffuse depuis longtemps de la désinformation climatique – a partagé une vidéo sur Facebook atteignant 39 000 vues en une journée, prétendant que « le CO₂ n’est pas corrélé avec la température » en se basant uniquement sur les données de température d’une seule région (l’Angleterre centrale).
Nous avons expliqué plus haut pourquoi il est trompeur de choisir un lieu unique pour représenter un changement climatique global. De plus, la CO2 Coalition induit également le public en erreur d’une autre manière : en comparant ces données aux émissions annuelles de CO₂, comme nous l’expliquons ci-dessous.
LA HAUSSE DE LA CONCENTRATION DE CO₂ DANS L’ATMOSPHÈRE TERRESTRE PROVOQUE UNE AUGMENTATION DES TEMPÉRATURES – SE FOCALISER UNIQUEMENT SUR LES ÉMISSIONS ANNUELLES PEUT ÊTRE TROMPEUR
Les émissions annuelles de CO₂ peuvent varier. Cependant, c’est la quantité totale de CO₂ dans l’atmosphère qui influence la température mondiale. Comme l’a expliqué Scaife à Science Feedback :

Adam Scaife
Professeur, Université d’Exeter
« C’est la quantité totale de CO₂ dans l’atmosphère (ainsi que l’accumulation des émissions au fil du temps) plutôt que les émissions annuelles qui est la plus étroitement liée au réchauffement climatique. Toutefois, des événements comme El Niño ou des éruptions volcaniques ponctuelles peuvent perturber cette relation, qui n’est donc pas parfaitement linéaire. De plus, à l’échelle locale, bien qu’il existe une relation entre la température et le CO₂, celle-ci est influencée par les variations des conditions météorologiques locales. »
Le Met Office du Royaume-Uni a repris cette idée en expliquant :
« Ils [la CO2 Coalition] utilisent les émissions de CO₂ dans leur graphique, plutôt que la concentration de CO₂ dans l’atmosphère […]. Or, c’est la concentration qui entraîne le réchauffement climatique, donc le graphique présenté dans la vidéo est trompeur à cet égard également. »
Bien que la distinction entre les émissions et la concentration en CO2 puisse sembler subtile, elle est essentielle car tout le CO₂ émis ne reste pas dans l’atmosphère terrestre. Il existe des processus naturels qui stockent le CO₂ ailleurs, comme dans les océans et les forêts.
Ainsi, corréler les émissions annuelles de CO₂ – plutôt que l’accumulation réelle de CO₂ dans l’atmosphère – aux variations de températures est trompeur. De plus, le Met Office a expliqué à Science Feedback que les températures du Royaume-Uni peuvent naturellement varier à des échelles annuelles et décennales (comme le montre la nature irrégulière de la ligne bleue dans la figure 2). Ces variations sont observées aussi en France, comme le montre la figure 3.
Comme l’a précisé une étude de 2024 publiée dans l’International Journal of Climatology, les températures du Royaume-Uni fluctuent plus à l’échelle annuelle que les températures globales, car « le Royaume-Uni ne couvre qu’une infime fraction (~1/2000) de la surface terrestre »[3].
Ces variations locales peuvent donner l’impression que la relation entre les concentrations atmosphériques de CO₂ et le changement de température local est plus floue. Comme l’a expliqué Scaife à Science Feedback :

Adam Scaife
Professeur, Université d’Exeter
« Pour les températures locales, bien qu’il existe une relation entre la température et le CO₂, elle est aussi mêlée aux fluctuations des conditions météorologiques locales. »
Cependant, comme nous l’avons mentionné plus tôt, il est clairement établi que l’augmentation des concentrations de CO₂ atmosphérique est le principal moteur de la hausse des températures mondiales[1]. Il n’y a aucune raison de sélectionner arbitrairement une région ou un lieu spécifique – ce qui introduit davantage de variabilité et rend les tendances moins claires – alors que des études bien plus rigoureuses et scientifiquement solides ont démontré un lien évident.
Comme le montre la figure 4 ci-dessous, les scientifiques ont constaté que, à l’époque contemporaine, les gaz à effet de serre sont la principale cause du réchauffement climatique parmi tous les facteurs de changement climatique, et que le CO₂ est celui contribuant le plus au réchauffement mondial.
Feedback des scientifiques
Questions de Science Feedback :
1. Si le réchauffement climatique ne réchauffe pas la Terre au même rythme partout, quels sont les facteurs qui contribuent à ces variations de taux de réchauffement ?
2. Les émissions anthropiques de CO₂ sont-elles bien corrélées avec les données de température d’un seul lieu (plutôt qu’avec la température moyenne mondiale) ?

Adam Scaife
Professeur, Université d’Exeter
1. Bien qu’elles soient liées, nous ne nous attendons pas à une relation parfaite et directe entre les températures régionales et les températures mondiales. Cela serait peu probable, étant donné que les conditions météorologiques locales, l’état de la surface des océans et les variations géographiques des taux de réchauffement influencent tous les températures locales. Cela dit, la température moyenne de l’Angleterre centrale (CET) et la température moyenne mondiale ont toutes deux augmenté d’environ 1°C au cours du siècle dernier, ce qui montre une certaine cohérence entre les enregistrements.
2. C’est la concentration totale de CO₂ dans l’atmosphère (ainsi que l’accumulation des émissions au fil du temps) plutôt que les émissions annuelles qui influence le plus le réchauffement climatique. Cependant, des événements comme El Niño ou des éruptions volcaniques ponctuelles peuvent perturber cette relation, qui n’est donc pas parfaitement linéaire. De plus, à l’échelle locale, bien qu’il existe une relation entre la température et le CO₂, celle-ci est influencée par les fluctuations des conditions météorologiques locales.
Met Office du Royaume-Uni :
1. Un exemple expliquant pourquoi les régions se réchauffent à des rythmes différents est que l’eau se réchauffe plus lentement que la terre. Cela signifie qu’en moyenne, le centre des terres émergées devrait se réchauffer davantage que les régions proches des océans. D’autres facteurs, comme la topographie et la latitude, jouent également un rôle. Certaines parties de la planète, comme l’Arctique, se réchauffent plus rapidement que d’autres. Aux pôles, les glaciers et les calottes glaciaires réfléchissent l’énergie du soleil vers l’espace. Ainsi, lorsque la quantité de glace diminue, moins d’énergie solaire est réfléchie. La région se réchauffe alors encore plus vite, provoquant la fonte d’une quantité encore plus importante de glace. Ce phénomène est connu sous le nom de boucle de rétroaction positive. Ces changements de température ont également un impact sur la répartition des précipitations et les taux de variation à l’échelle mondiale.
2. Les liens suivants fourniront des informations pour cette question. Un point à noter concerne la manière dont les données CET sont affichées dans la vidéo. Si les données sont présentées sous forme d’anomalies, il est possible d’observer la corrélation entre le CO₂ et la température CET.
Informations sur le CO₂ et le changement climatique : https://weather.metoffice.gov.uk/climate-change/climate-change-questions
Informations sur le CET, y compris un graphique montrant un alignement plus proche des concentrations de CO₂ : https://www.metoffice.gov.uk/research/climate/maps-and-data/cet-series
Tableau de bord climatique du Met Office avec de nombreuses données et graphiques montrant la relation entre le CO₂ et la température : https://climate.metoffice.cloud/
Cette vidéo sur les bases du changement climatique propose une expérience montrant l’impact du CO₂ sur la température : https://youtu.be/d9MYUUt8cK0?si=Zah_lxqS31aKiOrg&t=113
Question supplémentaire posée au Met Office :
SF : Est-il pertinent d’utiliser les données de température d’un seul endroit (par exemple, l’ensemble de données HadCET pour l’Angleterre centrale) pour tirer des conclusions sur le réchauffement climatique global ? Si ce n’est pas le cas, pourquoi ?
Met Office : « Le réchauffement climatique est par nature un phénomène global et, bien que nous puissions observer les changements climatiques à l’échelle régionale, adopter une perspective globale est une approche plus robuste pour analyser les tendances générales. Certaines régions, comme l’Arctique, se réchauffent beaucoup plus rapidement que d’autres parties du monde, par exemple. Du point de vue du Royaume-Uni, un graphique dans le rapport UK State of the Climate 2023 est pertinent, comparant le Royaume-Uni aux températures terrestres mondiales et aux températures combinées terre-océan sur une période plus récente que le CET. Pour l’ensemble de données HadCRUT5 mentionné ci-dessous, près de 8 000 stations météorologiques terrestres contribuent à cet ensemble de données. »
« À l’échelle mondiale, le réchauffement est plus marqué aux hautes latitudes qu’à l’équateur, et plus important sur les terres que sur les océans (GIEC, 2021, Blunden et Boyer, 2022). La décennie la plus récente, 2014-2023, a été de 1,25 °C plus chaude que la période 1961-1990 pour le Royaume-Uni, contre 0,85 °C pour la température moyenne de surface mondiale et 1,15 °C pour les terres émergées à l’échelle mondiale. Le climat du Royaume-Uni est soumis à des modes naturels de variabilité s’étendant sur plusieurs années à plusieurs décennies, qui se superposent à toute tendance à long terme. En tenant compte de ce facteur, le réchauffement sous-jacent observé au Royaume-Uni est cohérent avec celui observé à l’échelle mondiale sur les terres émergées. »[3]
RÉfÉrences
- 1 – IPCC (2021) Sixth Assessment Report.
- 2 – IPCC (2018) Global Warming of 1.5°C.
3 – Kendon et al. (2024) State of the UK Climate 2023. International Journal of Climatology. - 4 – Zhong and Haigh (2013) The greenhouse effect and carbon dioxide. Royal Meteorological Society Weather.
- 5 – Wang et al. (2023) Climate change: Strategies for mitigation and adaptation. The Innovation Geoscience.
- 6 – Rantanen et al. (2022) The Arctic has warmed nearly four times faster than the globe since 1979. Nature Communications Earth & Environment.