- Climat
Le CO2 est un gaz à effet de serre en raison de ses propriétés physiques : même s’il ne représente qu’une petite partie de l’atmosphère, il impacte le climat global
À RETENIR
- L’atmosphère terrestre est principalement composée d’oxygène, azote et argon, des gaz qui n’interagissent pas avec le rayonnement infrarouge émis par la Terre.
- Les autres composants sont notamment les gaz à effet de serre, comme le CO2, qui représente 0,04% du volume de l’atmosphère.
- Les gaz à effet de serre, eux, interagissent avec le rayonnement infrarouge, le piégeant et ré-émettant notamment vers la surface de la Terre.
- Les rejets de CO2 liés aux activités humaines ont augmenté la concentration en CO2 de l’atmosphère de 50% entre 1750 et 2023.
- Cela déséquilibre les flux d’énergie entrants et sortants de la planète, qui se réchauffe pour rétablir l’équilibre.
- En conséquence, la température moyenne à la surface a augmenté d’un peu plus de 1°C depuis 1850-1900.
ÉLÉMENT ANALYSÉ
Verdict :
Affirmation :
Le CO2 ne représente que 0,04% de l’atmosphère, les émissions anthropiques sont négligeables.
dÉtailS DU VERDICT
Erroné :
Les rejets de CO2 liés aux activités humaines ne sont pas négligeables, ils ont augmenté la concentration en CO2 de l’atmosphère de 50% entre 1750 et 2023.
Trompeur :
Le CO2 représente 0,04% du volume de l’atmosphère, mais il a des propriétés physiques particulières : il absorbe le rayonnement infrarouge, déséquilibrant l’équilibre énergétique de la planète et provoquant un réchauffement global.
affirmation complète
Donc pour les écologistes, il faut combattre le CO2, dont je rappelle que c'est quand même une composante de 0,04 % de l'ensemble de l'air que nous respirons et qui entoure la planète. Et les émissions, dites anthropiques, représentent 0 quelque chose derrière la virgule. Autrement dit, on combat la capacité de réchauffer l'atmosphère de 0,004 %, et on considère que les 99,997 autres % ne comptent pour rien dans le réchauffement climatique.
Vérification
En matière de désinformation, plusieurs techniques sont récurrentes. L’une d’entre elles consiste à énoncer un fait avéré et en donner une fausse interprétation. Par exemple, « les gaz à effet de serre ne représentent qu’une infime partie de l’atmosphère » : c’est vrai. « Il n’y a donc aucune raison que la hausse de leur concentration affecte le climat global » : ce raisonnement est faux puisqu’il ignore la physique du climat, qui établit sans ambiguïté que les gaz à effet de serre ont un puissant effet de réchauffement de la surface des planètes.
Cathy Clerbaux, chercheuse CNRS spécialiste de la surveillance de la composition atmosphérique au Laboratoire Atmosphères & Observations Spatiales/Institut Pierre Simon Laplace, indique à Science Feedback :
« L’atmosphère de Vénus est composée à 96% de CO2. Elle est plus près du Soleil que la Terre et reçoit donc deux fois plus de Soleil. Mais c’est bien son atmosphère saturée en CO2 qui explique la température si élevée à sa surface… 460°C ! Mercure qui est plus proche du Soleil est moins chaude. »
Le CO2 représente 0,04% du volume de l’atmosphère et contribue en grande partie à l’effet de serre
L’atmosphère terrestre est une enveloppe gazeuse entourant notre planète. Son épaisseur est en moyenne de 600 kilomètres. Comme l’indique le site de Météo France, elle est composée à 99% d’azote (N2), oxygène (O2) et argon (Ar). La faible proportion restante comprend les gaz traces : gaz à effet de serre (H2O, CO2, CH4, N2O, O3, CFCs), polluants (NO2, SO2, CO, etc.) et autres (voir figure 1). Le CO2 représente environ 0,04% de l’atmosphère terrestre.
Mais le CO2 a des propriétés particulières : il est un gaz à effet de serre, comme nous le décrivions déjà dans un précédent article. Comme l’écrit Cathy Clerbaux sur le site Le climat en questions :
« Les gaz à effet de serre représentent une petite proportion de l’atmosphère mais leur rôle est déterminant. Ils contrôlent la température de la surface de la Terre et des basses couches de l’atmosphère à cause de leur capacité à absorber la radiation infrarouge. »
La Terre reçoit en permanence le rayonnement émis par le Soleil. Une partie de ce rayonnement est absorbée par les continents et les océans, qui le ré-émettent sous la forme d’un rayonnement infrarouge chaud (voir figure 2). Les gaz majoritaires de l’atmosphère (O2, N2 et Ar) sont transparents à ce rayonnement : il les traverse et repart vers l’espace. Mais à l’inverse, les gaz à effet de serre absorbent le rayonnement infrarouge en raison de leur structure et leurs propriétés physiques. Les gaz à effet de serre comme le CO2 piègent le rayonnement infrarouge et le ré-émettent dans toutes les directions, dont la surface de la Terre.
Résultat : grâce aux gaz à effet de serre, la température à la surface de la Terre est plus élevée. Cathy Clerbaux nous indique : « Sans ces gaz à effet de serre, il ferait -18°C à la surface de la Terre. Ces 0.04% de gaz présents (avant même la présence des humains) expliquent pourquoi en moyenne la surface de la Terre est à 15°C. » Pour reprendre l’exemple des autres planètes cité par Cathy Clerbaux, sans CO2 dans son atmosphère, la température à la surface de Vénus serait de -53°C (contre 460°C !).
Il est donc trompeur d’affirmer qu’en raison de la faible proportion du CO2 dans l’atmosphère, celui-ci n’est pas un gaz important pour le climat : ses propriétés différentes des gaz majoritaires (O2 et N2) le rendent plus impactant pour le climat.
La concentration atmosphérique en CO2 augmente en raison des activités humaines
Le 31 janvier 2025 dans Sud Radio, l’économiste Philippe Bechade affirme : « […] Et les émissions dites anthropiques représentent 0 quelque chose derrière la virgule. Autrement dit, on combat la capacité de réchauffer l’atmosphère de 0,004% et on considère que les 99,997 autres pourcents ne comptent pour rien dans le réchauffement climatique. » Ce raisonnement trompeur laisse sous-entendre que le CO2 n’influence pas le climat en raison de sa faible proportion dans l’atmosphère, ce qui est faux. De plus, Bechade minimise l’influence des activités humaines sur le réchauffement climatique en sous-entendant qu’elles sont trop faibles pour changer la concentration atmosphérique de CO2.
Le CO2 est naturellement présent dans l’atmosphère, mais les activités humaines augmentent sa concentration. La combustion d’énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole) ou encore la déforestation rejettent en effet du CO2. Entre 1850 et 2019, environ 2390 milliards de tonnes de CO2 ont été rejetés par les activités humaines[2] (voir figure 3).
56% de ce CO2 anthropique rejeté est absorbé dans les puits de carbone naturels chaque année[2]. À terre, la végétation capte le CO2 de l’atmosphère par la photosynthèse, stockant le carbone dans la végétation et les sols. Dans les océans, le carbone dissous s’accumule également grâce aux échanges entre l’atmosphère et la surface des océans. Seul 44% du CO2 anthropique rejeté chaque année reste ainsi dans l’atmosphère. Résultat : la concentration atmosphérique en CO2 est passée de 278 ppm en 1750 (parties par millions, soit 278 molécules de CO2 sur 1 million de molécules d’air; ou 0,0278% du volume de l’atmosphère) à 419 ppm en 2023 (voir figure 3). Ce niveau est le plus élevé depuis au moins 2 millions d’années[1].
La hausse du CO2 perturbe l’équilibre énergétique terrestre
Plus les gaz à effet de serre augmentent dans l’atmosphère, moins le rayonnement infrarouge est renvoyé vers l’espace. Ce bilan d’énergie entre le rayonnement reçu et celui réémis est appelé bilan radiatif terrestre. L’augmentation de la concentration atmosphérique en CO2 (et des autres gaz à effet de serre) impacte le bilan radiatif terrestre. Didier Hauglustaine, chercheur CNRS sur la modélisation de la composition chimique de l’atmosphère au laboratoire des sciences du climat et de l’environnement, détaille à l’AFP :
« On pourrait se dire ‘nos émissions sont faibles par rapport à ce que représente l’atmosphère’, mais non, car l’atmosphère est vraiment une couche très mince. […] En émettant nos milliards de tonnes de carbone par an, […] avec des gaz […] très peu abondants, qu’on appelle gaz traces, [on] modifie le climat. »
Avant l’ère industrielle, les flux d’énergie étaient stables : une quantité constante d’énergie (les rayons solaires) entrait et sortait (le rayonnement infrarouge) de l’atmosphère. On parle d’un bilan radiatif à l’équilibre, la température moyenne globale était stable (à gauche sur la figure 4). Les rejets additionnels de CO2 en raison des activités humaines déséquilibrent le bilan radiatif terrestre (à droite sur la figure 4). Une quantité plus importante d’énergie reste piégée sur Terre : les océans, terres, glaces et atmosphère accumulent cette énergie.
Les causes de ce déséquilibre sont appelées des « forçages radiatifs ». Un forçage radiatif positif (la hausse des gaz à effet de serre) augmente la quantité d’énergie à l’intérieur de l’atmosphère, un forçage négatif (la hausse des aérosols) la diminue. Le forçage radiatif des différents éléments constituant l’atmosphère est évalué par les scientifiques, en watt (la quantité d’énergie) par mètres carrés (par unité de surface). Le CO2 émis par les activités humaines représente le plus important forçage radiatif (voir figure 5) : il est évalué à environ 2,16 W.m-2 entre 1750 et 2019[1] (voir figure 5 ‘carbon dioxyde’). Au total, les activités humaines ont entraîné un forçage radiatif de 2,72 W.m-2 depuis 1750[2].
Le forçage radiatif provoqué par les rejets du CO2 entraîne un réchauffement global de la planète
Ces chiffres peuvent paraître abstraits, mais ils se traduisent très concrètement par une hausse des températures moyennes à la surface de la Terre. « En réaction à ces forçages, le système Terre se réchauffe ou se refroidit, de façon à rétablir l’équilibre en modifiant la quantité de rayonnement thermique sortante. Plus la Terre est chaude, plus elle émet de rayonnement », explique le GIEC dans le 6ème rapport de synthèse[1].
Les émissions anthropiques de CO2 ont contribué à réchauffer la planète d’environ 1°C entre 1750 et 1900 (voir figure 6). D’autres molécules sont responsables de forçages positifs et négatifs : le bilan s’établit à une température moyenne globale plus élevée de 0,8 à 1,3°C (avec une meilleure estimation à 1,07°C) entre les périodes 1850-1900 et 2010-2019[2] (une période différente de celle couverte par la figure 6 ci-dessous, expliquant la différence d’estimation). En 2024, la température moyenne globale dépasse de 1,6°C les niveaux pré-industriels, comme nous l’expliquions dans cet article.
CONCLUSION
Le CO2 est un gaz présent en faible quantité (environ 0,04% du volume) dans l’atmosphère. Mais ses propriétés physiques sont différentes des gaz majoritaires de l’air : il absorbe le rayonnement infrarouge. En le ré-émettant en partie vers la Terre, il la réchauffe : c’est ce qui explique qu’on qualifie le CO2 de gaz à effet de serre. Contrairement à ce que sous-entend Bechade, les rejets de CO2 en raison des activités humaines impactent le climat global de la Terre, et ce même si le CO2 n’est présent qu’en petite quantité dans l’atmosphère. La hausse de la concentration en CO2 (et en d’autres gaz à effet de serre) augmente la quantité d’énergie sur la Terre, entraînant un réchauffement à la surface évalué à 0,8 à 1,3°C (avec une meilleure estimation à 1,07°C) entre les périodes 1850-1900 et 2010-2019.
RÉFÉRENCES
- 1 – GIEC (2021) Chapter 7: The Earth’s Energy Budget, Climate Feedbacks, and Climate Sensitivity. In Climate Change 2021: The Physical Science Basis. Contribution of Working Group I to the Sixth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change
- 2 – GIEC (2021) Résumé technique. In Changement climatique 2021 : les bases scientifiques physiques.
Feedback des scientifiques
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Cathy Clerbaux
Directrice de recherche CNRS, Laboratoire Atmosphères & Observations Spatiales, Institut Pierre Simon Laplace
SF : Comment le CO2 peut-il impacter autant la température globale en ne représentant que 0,04% de l’atmosphère ?
C.C. : 99.9% de l’atmosphère est composé d’azote (N2) et d’oxygène (O2), avec un peu d’argon (Ar). Le 0.04% restant ce sont les gaz à effet de serre: H2O, CO2, CH4 etc.
L’azote, l’oxygène et l’argon n’interagissent pas (ils sont « transparents ») avec la radiation IR émise par la terre. Seuls les gaz à effet de serre interagissent.
Sans ces gaz à effet de serre il ferait -18°C à la surface de la terre. Ces 0.04% de gaz présents (avant même la présence des humains) expliquent pourquoi en moyenne la surface de la terre est à 15°C.
SF : Pourquoi les puits de carbone n’absorbent qu’une partie du CO2 émis par les activités humaines ?
C.C. : Les puits de carbone sont l’océan et la végétation, qui absorbent environ 50% de nos émissions. Le surplus reste dans l’atmosphère. Pourquoi pas plus? Parce qu’ils ne savent pas suivre…
SF : Comment ces rejets de CO2 perturbent-ils le bilan radiatif de la planète ?
C.C. : Le CO2 présent de manière naturelle (avec les autres gaz à effet de serre) explique pourquoi les températures sont celles qu’on connaît (passage de -18°C à +15°C). L’excès de CO2 dû aux activités anthropiques rajoute environ 1.5°C en plus, qui est l’augmentation qu’on mesure depuis la révolution industrielle.
SF : Souhaitez-vous apporter d’autres éléments concernant ces affirmations de Philippe Bechade ?
C.C. : Si je l’avais en face de moi je lui demanderais comment il explique les températures sur Vénus… 460°C ! Son atmosphère est composée à 96% de CO2… Et alors il me dirait sans doute que Vénus est plus près du soleil que la terre. Oui elle reçoit 2x plus de soleil mais c’est bien son atmosphère saturée en CO2 qui explique cette température si élevée à sa surface (Mercure qui est plus proche du soleil est moins chaude).
CQFD.